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faire sentir la pensée que l’on exprime. C’est là un des plus séduisants moyens de toucher l’Auditeur ; mais peu de personnes savent l’exécuter. Il faut encore une grande habitude pour donner à sa voix les inflexions qui conviennent ; une bonne poitrine, pour la ménager ; beaucoup de jugement, pour découvrir le sens de l’Auteur ; et donner, s’il est possible, à son Ouvrage plus d’esprit qu’il n’y en a voulu mettre.

Toutes ces observations, et les règles que l’on trouve dans les livres qui ont traité de la déclamation, exécutées grossièrement, font le Comédien. Quand on les met en usage noblement, avec facilité, avec délicatesse, c’est ce qui constitue l’Acteur. Car je mets une grande différence entre l’un et l’autre. Celui—là anime son action, comme un Artisan commun fait son métier ; celui-ci, maître de sa matière, donne à son jeu tout le vrai, toute la délicatesse que la nature exige.

Mais, diront quelques Lecteurs indifférens, voilà bien sérieusement répondu à une foible Critique ! On est aisément piqué, quand on est traité d’ignorant : je n’ai pu tenir contre l’envie que j’avois de faire retomber ce reproche sur mon Censeur.