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Cet ordre fut un coup de foudre pour les Comédiens, et pour l’Auteur. Ceux-là attendoient avec justice un gain considérable de cette pièce ; et Molière croyoit donner par cet Ouvrage une dernière main à sa réputation. Il avoit manié le caractère de l’hypocrisie avec des traits si vifs et si délicats, qu’il s’étoit imaginé que bien loin qu’on deût attaquer sa pièce, on luy sauroit gré d’avoir donné de l’horreur pour un vice si odieux. Il le dit lui-même dans sa Préface à la tête de cette pièce : mais il se trompa, et il devoit savoir par sa propre expérience que le public n’est pas docile. Cependant Molière rendit compte au Roi des bonnes intentions qu’il avoit eues en travaillant à cette pièce. De sorte que sa Majesté aïant vu par elle-même qu’il n’y avoit rien dont les personnes de piété et de probité pussent se scandaliser, et qu’au contraire on y combatoit un vice qu’elle a toujours eu soin elle-même de détruire par d’autres voies, elle permit aparemment à Molière de remettre sa pièce sur le théâtre.