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cet autour, et, en général, les écrivains du Moyen Âge, aient pris, dans un sens différent, la rubèbe ou le rebec, qu’ils se bornent, dans certains passages, à distinguer d’avec la vielle[1]. » — Quant à Fétis, il dit carrément : « M. de Coussemaker a confondu le rebec avec la rubèbe de Jérôme de Moravie : celle-ci était la basse, l’autre le dessus[2]. »

Nous pensons qu’il est possible d’apporter un peu de lumière dans ce débat et de trouver l’explication logique des textes d’Aymeric de Peyrac et de Gerson, en remontant à la naissance de la rubèbe. Or, cet instrument n’était pas le seul dérivé de la lyra, il y avait aussi la gigue, la plus répandue des deux et aussi la plus petite, ou plutôt celle dont la caisse de résonance était la plus étroite, la plus effilée. Avec elle, il n’était pas nécessaire de hausser d’une octave l’accord de Jérôme de Moravie pour obtenir des sons aigus, elle devait les donner naturellement, puisque c’était là son caractère, sa nature même. Elle formait avec la rubèbe les deux variétés de l’espèce, et y tenait l’emploi de dessus. L’autre n’en était pas la basse, mais plutôt le ténor ; car la basse des bas instruments à archet était alors le grand monocorde ;

Qui à tous instrumens s’accorde,


comme dit Guillaume de Machault dans son poème sur la Prise d’Alexandrie. C’est ce dernier instrument qui prit plus tard le nom de trompette marine, lorsqu’il fut muni du petit chevalet mobile, qui, par ses frémissements imitait un peu le timbre de la trompette. Donc, si l’on veut bien comparer la rubèbe et la gigue avec les deux textes précités, on arrivera facilement à se convaincre que Gerson et Aymeric de Peyrac ont bien pu confondre ces deux instruments à cause de leur ressemblance, laquelle s’augmentait encore par la manière de les tenir pour les jouer ; et l’on pourra très bien admettre,

  1. Les danses des Morts, p. 240.
  2. Histoire générale de la musique, t. V, p. 166.