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assez pour humilier et pas assez pour sauver. Comme on l’espérait peut-être, ce patronage impérial arrêta net le bon vouloir des républicains et la souscription ouverte. Plus tard, mais trop tard, les Chambres votèrent une pension viagère et la Ville offrit le chalet de la Muette. Lamartine put donc se reposer un peu et attendre la mort.

Saint-Point lui restait encore cependant. Il n’avait pu se résoudre à vendre le tombeau de sa fille et de sa mère, il allait s’y retremper les mois d’été et d’automne. Il m’y avait invité souvent. Je tenais à voir le poète dans son cadre naturel. J’y allai en octobre 1867. Parti de Mâcon de bonne heure, j’arrivai à Saint-Point avant le déjeuner. Le site est charmant. C’est bien le nid d’un poète. On aperçoit de loin la tourelle du château. Je ne pus la voir sans émotion, et je me récitai les premiers vers de son épître à Victor Hugo, écrits aux jours heureux de sa jeunesse :

Je sais sur la colline
Une blanche maison.
Un rocher la domine ;
Un buisson d’aubépine
Est tout son horizon.

À gauche du château, sur le même mamelon, s’élève la jolie église du village qui touche le parc ; des vergers descendent en pente verdoyante