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POÈMES ÉPARS

CONSOLATION
A MADAME TH. BLAC

Quelquefois dans mon cœur que le chagrin consume
Je me sens torturé par un remords secret.
Ma pensée a des flots de vase et d’amertume,
Où, comme un nénufar, monte un triste regret.

Je me dis : Qu’ai-je fait ? Quelle trace posthume.
Où la postérité puisse prendre intérêt.
Signalera mon nom, phare éteint dans la brume ?
La gloire a dédaigné mon essor indiscret.

Dans un stérile effort j’ai donc perdu ma vie ?
Tout a trompé mes vœux, mon rêve et mon envie.
Que suis-je ? Rien 1 à peine un obscur écrivain.

Mais un ange invisible est là qui me console,
Et me murmure au cœur cette douce parole :
« Rendre sa mère heureuse, est-ce donc vivre en vain ?

Baume, octobre 1883.