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du Chevalier Des Touches ne sont jamais a dédai- gner.

Au lieu (loiu* do se roiilernior dans l'analyse stricte dos livres soumis a son appréciation, Barbey d'Aurevilly continue pour ainsi dire son travail de création, son labeur d'imagination toujours en éveil, même lorsqu'il s'agit de critique pure. Il voit Lamartine et Victor Hugo, par exemple, du même regard intuitif qu'il a jeté sur les personnages de ses propres romans. 11 ne les examine pas, la loupe à la main; il les pénètre d'un coup d'œil divinateur. C'est de cette façon qu'il passe en revue successivement les principaux genres où s'est essayé l'esprit humain.

Pour lui, la philosophie n'est pas un ensemble de con- naissances précises, coordonnées, systématisées ; il n'y veut point chercher de froides et exactes dissertations sur l'être, la vie, la nature des choses et des honmies et ne consent pas à y refréner les ardeurs de la « spécu- lation » créatrice. A ses yeux, les philosophes doivent prendre un large essor, que rien ne Umite, dans l'infini du temps et de l'espace, dans l'immensité de l'âme, du monde et de Dieu. C'est pour cela que toutes ses sym- pathies sont acquises aux métaphysiciens et qu'il aime Platon, Malebranche, Hegel, Gratry, Blanc de Saint- Bonnet. (1) On devine dès lors ce qu'il doit penser de la philosophie du XIX« siècle, en général, et surtout de

(1) Blanc de Suiiit-Bonnet (181^-1880) pliilosoiihe lyonnais trop peu connu, a écrit ([uelques livres, d'une belle langue et d'une grande élévation de pensée, sur la Douleur, V Unité Spiriluelle, etc.. l\ était très attaché à la doctrine caUiolique ultramontaine ; et d'Aurevilly Ta rangé au nombre de ses Prophètes du Passé, à côté de Joseph de Maistre, Donald, Chateau- briand et Lamennais.