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de libertés prises avec le « divin» et de soumission exté- rieure, qui donne à notre tempérament son caractère atavique de superstitieux bien plus que de religieux ». (1) Grâce donc à l'effort d'amis dévoués, à la préoccupation des intelligences les plus élevées de notre temps et à l'obscure collaboration des années qui dans leur fuite éclairent d'une lumière plus douce les hommes et les choses, — Barbey d'Aurevilly a quitté les orageuses régions de la lutte et les grises pénombres de Tindififé- rence. Il est revenu des lointains rivages de l'histoire, où il avait cherché un asile contre les misères contempo- raines, et des ténèbres du tombeau, où il s'était enseveli voilà douze ans passés. Il est entré dans une nouvelle existence. Il ressuscite comme un ancêtre toujours vivant et jeune. On ne cherche maintenant ni à l'exalter à outrance ni u le dénigrer de parti-pris. La presse réserve un excellent accueil à ses œuvres posthumes. Même les journaux et les Revues, qu'il a le plus violemment attaqués, le Journal des Débats et la Revue des Deux- Mondes, par exemple, seraient tout disposés, j'imagine, à lui rendre justice. Ce n'est peut-être que l'occasion qui leur manque.
Il n'est pas jusqu'à l'Académie française, après laquelle le tirailleur du Nain Jaune s'est tant acharné, qui ne consente à oublier les Médaillons, si cruellement injustes, de 1863. A la fin de sa vie, d'Aurevilly ne comptait guère que deux amis sous la Coupole, — et deux amis do cœur plutôt que d'esprit : Désiré Nisard et François Coppée. Aujourd'hui, il y rencontrerait sans peine une quin;^aine d'admirateurs fidèles et quatre ou cinq débi- teurs intellectuels. S'il abandonnait l'immortalité d'outre-
(1) Lettre inédite de M. Hugues Le Roux (2 septembre 1900).