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et fler, d'une intelligence haute et qui va au grand, aune plume de laquelle on peut dire sans flatterie qu'elle ressemble souvent a une épée. Cette plume, si appréciée de ceux qui s'attachent à la véritable distinction, le sera également de tous le jour où lui-même voudra bien consentir à en modérer les coups et les étincelles. La pensée, chez lui, naît toute armée, les images éclatent d'elles-mêmes : il n'a qu'à choisir et à en sacrifier quel- ques-unes pour faire aux autres une belle place, la place qui paraisse la plus naturelle » (1). Et c'est tout ! Pas un mot d" Une Vieille Maîtresse, pas un mot de r Ensorcelée, pas un mot des Poésies. La part était maigre pour le romancier normand ; d'Aurevilly l'avait faite ou la fit infiniment plus large au poète de Joseph Delorme, au critique de Chateaubriand et à l'historien de Port-Royal. Mais ce fut bien pis encore, après l'édition de Maurice de Guérin. Ici la malice et la rancune de Sainte-Beuve apparaissent en pleine lumière. On sait pourtant que Barbey d'Aurevilly n'avait rien ménagé pour se concilier la faveur du maître des Lundis ; seulement il avait le tort de le traiter d'égal à égal, et cette prétention ne lui fut point pardonnée. La brouille entre les deux confrères, déjà marquée en 1858, fut consommée aux derniers fours de 18G0. Elle éclata définitivement à propos d'une publi- cation sur Joseph de Maistre. Sainte-Beuve avait rendu compte, avec un plaisir et une bienveillance non dissi- mulés, de la correspondance diplomatique de l'auteur du Pape et s'étonnait qu'on ne l'eût point encore discutée. Sur-le-champ, d'Aurevilly proteste, disant qu'il s'était donné la peine de faire le travail réclamé. A quoi

(1) Sai.\te-Belve. Causeries du Lundi, t. XH, p. 216 et 247. Lundi 9 février 18o6.