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« fidèle, et, si c'est un rêve, je veux; rêver que nous nous « aimerons ». (1)
En 1857, Barbey d'Aurevilly écrivit Lt'.v Yeux Camé- léons, que Baudelaire admirait fort et dont il s'est certainement inspiré en plus d'un de ses poèmes.
« C'était une de ces nuits comme nous en passons... « Celle que nous détestons tous deux, mais qui, Elle ! « nous aime, la hanteuse de nos chevets, rinsomnie, « vint s'asseoir à C(jté de moi, et se mit à me regarder « avec ses yeux si g-rands, si mornes et si pâles, — ses « yeux si démesurément ouverts et qui, par un magné- « tisme implacable, dilatent les yeux qui les regardent
« et les empêchent de se fermer Vous n'avez pas
« toujours été de cette pâleur de fantôme, ô yeuxinfati- « gables de l'Insomnie ! Vous n'avez pas toujours été '< béants, stupéfaits, immobiles. Vous avez parfois « baissé la paupière. Vous avez eu l'éclat, le mouvement « et la vie. Je vous ai vus, — il n'y a pas si longtemps « encore ! — pointer mes nuits de vos lumières, plus « beaux, plus scintillants, plus nuancés que ces astres '< qui ne dorment pas non plus sur nos têtes et qui sont « les yeux des horizons !... Tous les yeux des femmes « qu'on aima, passaient, reflets de souvenirs, veloutés « par le passé et divinisés par l'impossibilité des « caresses, dans les miroirs ardents de tes yeux de « caméléon, ô Insomnie ! et nous y retrouvions jusqu'à « leurs larmes ! » (2)
Cinq ans auparavant, eu janvier iSôv?, d'Aurevilly avait composé celte romance d'an symbolisme touchant,
(1) Ri/lhmes oubliés (éd. LeinLMfo, 1897, p. a et 6}.
(2) Ri/lhmes oubliés (éd. Lemi'iir, IS'JT. p. 10 et siiiv