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11 l'avait connu en 1S4S, à répoqno où le jeune écrivain de ving-t-lrois ans était secrétaire de Lamartine. Il Fintro- duisit à la Mode. « Mon cher ami, — lui mandait-il le 24 septembre 1850, — aux: armes ! Mettez-vous à écrire sur la pièce jouée dernièrement aux Français votre premier article delà Mode. Vous pouvez m'apporter cela demain. Ne soyez pas trop long et étincelez, morbleu, étincelez ! Ne vous astreignez à rien. Causez, soyez charmant, avec un œillet blanc à la boutonnière. C'est une introduction qu'il nous faut, et je veux, pour l'honneur de ce que j'ai dit de vous, qu'elle soit brillante. Je vous ai appliqué le mot de Mathieu sur Paris : Si la Mode était une bague, Saint-Victor en serait le diamant. A vous. »(1) L'élève fut digne du Maître : le débutant tint les promesses de celui qui s'était porté son garant et sa caution.

Voici, au surplus, — et d'après les confidences de Barbey d'Aurevilly lui-même, — de quelle manière s'éta- blirent les relations de l'auteur du Brummell et du futur critique de Hommes et Dieux. « En 1848, — raconte d'Aurevilly, — j'étais au café d'Orsay. Je jugeais Hélio- gabale devant des gens qui se trouvaient là et je disais des choses à moi que les historiens n'ont pas dites ! Je voyais, en parlant, un jeune homme de bonne mine qui m'était inconnu et qui me suivait dn regard. Je l'inter- pellai. C'était Saint-Victor. Je l'envoûtai ! 11 vint me voir. Je finissais alors la Vieille Maîtresse; il la connut le premier. Nous nous liâmes, et. pendant trois ans, nous vécûmes en frères, l'un déjeunant chez l'autre, l'autre dînant chez l'un. »

(1) Poui- tous les détails des relations de Saiut-Vlctor avec Barbey d'Aure- villy, voir le très iutéressant ouvraije de M. Aiidor DEr./AM : Patd de Saint-Victot-' (Galmaiiu-Lévy, éditeur, 1886).