Page:Grelé - Jules Barbey d’Aurevilly, L’œuvre, 1904.djvu/212

Cette page n’a pas encore été corrigée

— 208 -

cas, c'est celle que constamment il invoque à l'appui de ses jugements. Il est facile d'en discerner l'importance dans les Proj^hrtcs du Passé. Cet ouvrage est tout à la fois une apologie enflammée do l'absolutisme religieux et un essai de critique ultraorthodoxe. Barbey d'Aurevilly s'y propose expressément et catégoriquement d'expliquer la théorie autoritaire et farouche qui jaillit des dogmes romains, comme de la source de toute vérité, et de l'appli- quer avec rigueur, dans sa stricte mesure, aux œuvres de l'esprit.

Son dessein n'apparaît pas moins clairement au cours du programme qu'il esquisse pour le Réveil, le 2 janvier 1858. « La critique n'existe point en France, — déclare-t-il d'un ton assuré, — à cette heure du XIX* siècle. Des critiques, il y en a, sans doute. — et peut-être y en a-t-il trop, — mais de la critique dans le pur et noble sens du mot, on en cherche en vain, il n'y en a pas... Même du temps de Gustave Planche, la Revue des Deux-Mondes n'avait pas de critique. Elle avait un critique, comme chaque journal a le sien... En effet, l'esthétique de Gustave Planche, qui l'a sue? où a-t-elle nettement rayonné ? Lui, le doctrinaire de la critique, quelle fut sa doctrine? en avait-il une? à quelle loi supérieure remon- tait-il pour reconnaître toujours, à coup sûr, la beauté dégradée de ce monde, cet art, — puisqu'il a parlé des choses de l'art encore plus qne des choses littéraires, — qui se rêve dans le cerveau grec, mais qui se sent dans le cœur chrétien? Voyageur à travers les musées et les ateliers, il venait raconter ses impressions de voyage à la Revue des Deux-Mondes, comme d'autres y revenaient, du Groenland ou de Nubie, raconter les leurs. Indivi- dualité pédante, qui n'a que l'empirisme de la science, qui raconte ses impressions comme si c'était la règle