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L'auteur, — dit-il on une fière préface, — « no croit qu'à la critique personnelle, irrévérente et indiscrète, qui ne s'arrête pas à faire de l'esthétique, frivole ou imbécile, à la porte de la conscience de l'écrivain dont elle examine l'cxuivro, mais qui y ponèlre. et quelquefois le fouet à la main, pour voir ce qu'il y a dedans. 11 ne pense pas qu'il y ait plus à se vanter d'èlre impersonnel que d'être inco- lore, — deux qualités aussi vivantes l'une que l'autre et qu'en littérature il faut renvoyer aux albinos! Enfin, il n'a, certes ! pas intitulé son livre les Œuvres et les Hommes, pour parler des œuvres et laisser les hommes de coté. Et d'ailleurs, il n'imagine pas que cela soit possible. Tout livre est l'homme qui l'a écrit, tête, cœur, foie et entrailles. La critique doit donc traverser le livre pour arriver à l'homme, ou l'homme pour arriver au livre. » (1). Puis, il expose, le vrai critère de ses jugements : « La conscience, — écrit-il, — la meilleure assise de nos (ouvres et de nos pensées... L'idéal dans les arts (si vous creusez bien) c'est la plus grande somme de moralité » (2). Et, dans son examen des Misérables, il parle de « la critique littéraire, qui doit être toujours de la critique morale » (3). Ce n'est pas qu'il assigne cette seule fonction morale à la critique ; mais il lui donne le pas sur la question littéraire, — « la question littéraire, une babiole ! >/ disait-il un jour, en une boutade char- mante, à son ami Trebulien.

Il serait injuste de pousser à l'excès l'expression de cette théorie. Plus d'une fois, d'Aurevilly s'est mis en

(1) Les l'hilosop/ies et les écrivains religieux [h\. Amvol, 1800), pré- face.

(2) Les Romanciers (éd. Amyot, 1865}, p. 30.

(3) Les Misérables, p. 17.