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faut voir, devant nous, mourir !» (1) Si l'art est plus apparent, ici, que dans les vers « Débouclez-les, vos longs cheveux de soie», il cède, néanmoins, toujours la place d'honneur à l'idée.

La question d'art semble plus importante encore dans les fictions romanesques. Toutefois d'Aurevilly n'hésite pas à la sacrifier, quand il le faut, à la pensée. « On ne commence pas par être artiste, — dit Jules Barbey dès 1832, en parlant de son héros Réginald, l'amoureux de Léa mourante, — l'homme finit par là ». Il semble que l'auteur de r Ensorcelée se soit approprié el imposé cette règle de ne devenir artiste qu'après avoir été penseur. Même au cours de ses Diaboliques qui, en tant que nouvelles, exigent plus de perfection plastique qu'un gros roman, il ne se fait pas de la question d'art une préoccupation éminente et primordiale. Avant tout, il s'intitule penseur et moraliste. Le reste vient par surcroît. S'il multiplie les images, c'est afin de mettre plus en relief l'idée fondamentale où il veut aboutir. Deux de ses chefs-d'œuvre, le Dessous de Cartes d'une jMrtie de Whist et le Bonheur dans le crime en sont un exemple frappant. Ils illustrent, chacun à leur manière, des idées profondes qui ne sont peut-être pas des vérités communes, mais qui ne sont pourtant pas des paradoxes et qui plongent au sein d'une réalité un peu idéalisée.

Il n'en va pas autrement de la critique de Barbey d'Aurevilly. Sainte-Beuve mettait beaucoup de coquet- terie dans ses Lmidis ; il se parait et faisait jolie toilette pour se présenter au public L'auteur des Œuvres et les Hommes cherche, avant tout, à frapper fort, — plutôt même qu'à frapper juste. Chacun de ses articles du

(l) Eijlhmes oubliés (éd. Lenierre) p. .^3 et f>4.