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L'hommage est complet à ki Normandie respectueuse de la tradition, pieusement attachée à son culte sécu- laire, fidèle image du passé survivant jusque dans le présent.

A dater de 1850, on peut dire que Barbey d'Aurevilly est exclusivement Normand. Pour lui, Normand signifie tout le reste : aristocrate, catholique, « individualiste ». Il n'a plus qu'à formuler, en termes lapidaires, le pro- gramme de sa maturité laborieuse. Il le fait, dans une lettre à Trebutien, au mois de juin 1S55. La formule est significative. D'Aurevilly la commente longuement et rinsère, pour en bien marquer l'importance, dans son Mémorandum de Caen, le 2 octobre 1856. « Romans, impressions écrites, souvenirs, travaux, tout doit être Normand pour moi et se rattacher à la Normandie... Quand ils disent de partout que les nationalités décampent, plantons-nous hardiment, comme des Termes, sur la porte du pays d'où nous sommes et n'en bougeons pas! »

Et il applique son programme à la lettre, autant du moins que le permettent les circonstances. Car le métier de critique, que d'Aurevilly a été contraint d'accepter, ne se prête pas aisément à la pratique quotidienne d'un programme aussi exclusif. Mais avec quel empressement et quelle joie le fils de Théophile Barbey saisit toutes les occasions de célébrer son cherCotentin ! A la mort de Brizeux, il publie un long article sur le barde breton : il lui reproche de n'avoir pas assez * vécu sur le cœur de son pays » (1) ; d'avoir « abandonné l'idiome natal » (2); de n'avoir pas été «assez breton». Non, s'écrie-t-il avec une émotion difficilement contenue, « ce n'est pas là,

(l et 2; Les Poètes, p. 80 et suiv. Amyot, éditeur, 1862. — Le Pays, octobre 1858,