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sou désir de se « singularisci' » grùcc à une posture héroïque qui lui fût personnelle.

Par bonheur, il se souvint du berceau de son enfance. Il se rappela le pays où ses ancêtres étaient nés, avaient vécu et reposaient encore dans la paix éternelle. 11 revit en son âme la race lointaine des Barbey, fermes comme un roc sur le sol où ils avaient grandi et étaient morts; il repassa la long'ue série des bienfaits dont il leur était redevable et se demanda ce que chacun de ces aïeux vénérés avait déposé de germes vivaces dans son cœur d'enfant prodigue qui avait fui la terre de ses Jeunes années. Sans doute il était revenu au bercail aristocratique et catholique de la famille ; mais son aristocratie et son catholicisme ne risquaient-ils pas de demeurer vagues, imprécis et vains, s'ils n'étaient fondés que sur le senti- ment de l'hormeur et sur une foi toujours fragile, qui ne peut se vanter d'être à l'abri de toute surprise? 11 fallait une base plus solide à ses croyances et à ses espoirs. 11 ne se contentait pas de la cité idéale qu'il avait construite, d'une main pieuse, dans les nuages du passé. Il voulait bâtir en pleine terre affermie et résistante. Mais où découvrir un centre de gravité susceptible de porter sans fléchir l'immense édifice que sa superbe orthodoxie nobiliaire et romaine avait rêvé? Ce centre de gravité, il le trouva au pays natal.

« Les tombeaux des pères, — écrivait Barbey d'Aure- villy en 1851, — sont le point d'appui et de ralliement des enfants dans la marche militaire de l'humanité » (1). La formule est belle et vraie. Depuis quatre ans déjà, l'auteur (ÏUne Vieille Maîti-essesQ l'était appliquée avec

(Il Les Prophètes du Passé, p. 131 (éd. Palmé).