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emprunté au jargon mystique du confessionnal, traduit l'exacte vérité. Oui, les principes de Barbey d'Aurevilly étaient bien arrêtés et inspiraient ses écrits ; mais ses passions ou ses fantaisies éclatantes étaient plus fortes encore et gouvernaient sa vie. On reconnaît là Fordinaire infirmité du cœur humain. Il s'est trouvé, à toutes les époques, des hommes, réputés les plus vaillants soutiens du catholicisme, et dont la conduite n'était pourtant pas à l'abri des reproches. Evidemment ils étaient inconsé- quents avec eux-mêmes et se piquaient fort pen de logique. Mais où donc a-t-on vu que la logique mènei^e'^

monde

Pour Barbey d'Aurevilly, le double aspect de sa vie g]^ de son œuvre s'explique assez aisément-.- L*a\itenr d©sr Projj/iètes du Passé est foncièrement catholique et n'est pas du tout chrétien. Catholique intransigeant sur le chapitre de la doctrine, il n'a pas, dans la conduite jour- nalière de l'existence, l'ombre d'une vertu chrétienne. Pour être chrétien, il faut se vaincre soi-même, dompter son orgueil, fléchir sa volonté, triompher de ses passions ; et un aristocrate endurci ne consentira jamais à diminuer ainsi sa personnalité. Au contraire, pour s'afficher catho- lique, il suffit de dire : Je crois à ce que l'Eglise aposto- lique et romaine m'ordonne de croire, j'y conforme ma conduite dans la mesure de mes forces ; mais pour cela j'ai besoin de la grâce divine. Si parfois ma raison fait entendre une timide protestation contre le dogme, je la dompte sans trop de mal, car je veux être humble d'es- prit. Quant au droit souverain d'agir à ma guise et de dominer autrui par mon rang social, je le réserve à ma volonté libre.

C'est ainsi que le catholique d'Aurevilly s'est fort peu soucié d'être chrétien. Jusqu'en cette attitude suprême