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Pas de réponse ! Cela me paraissait d’assez mauvais augure. N’importe, le dimanche annoncé nous prîmes le chemin de fer pour Pont-de-l’Arche. Arrivés à la gare, vers midi, personne. C’était encore de plus mauvais augure.

Mirbeau n’ayant pas cru devoir nous donner signe de vie, je ne voulus pas me présenter chez lui à l’heure du déjeuner, nous allâmes prendre le nôtre à l’auberge.

Le repas fini, nous nous mîmes en route pour les Damps où habitait Mirbeau. Ce fut une bonne qui répondit à notre coup de sonnette et nous déclara que Monsieur était en train de déjeuner, qu’il ne fallait pas le déranger. Nous n’avions qu’à nous retirer en laissant nos noms, et nous dîmes à la bonne d’avertir son maître, que nous repasserions un peu plus tard.

Ayant fait un tour dans le pays, jugeant que nous pouvions retourner, il nous fut répondu que Monsieur était sorti.

Cette fois la moutarde me monta au nez, trouvant que la plaisanterie dépassait la mesure. Nous nous rendîmes au bureau de poste, d’où j’adressai une carte postale à Mirbeau, lui notant que, m’étant présenté deux fois chez lui, après l’avoir prévenu de ma visite par lettre recommandée, non seulement, il n’avait pas cru devoir me répondre, mais avait refusé de me recevoir quoique chez lui, et qu’il eût à me retourner mon manuscrit. Et nous reprîmes le train pour Paris.

Je reçus la réponse suivante :

Mon cher Grave,

Le jour où je vous ai télégraphié (?) en rentrant à la maison, j’ai trouvé ma femme, qui était tombée dans l’escalier, évanouie, le poignet brisé. Il a fallu envoyer chercher un médecin à Rouen, bref, je n’avais guère le cœur à vous écrire. Voilà pourquoi vous n’avez pas reçu ma lettre.

Mais autre chose.

Je suis désolé, désolé de ce qui est arrivé, et la faute en est à cette petite fille, si sotte, qui vous a ouvert, et qui nous joue, gaminement, souvent de pareils tours. Huret était venu ce matin avec un de ses amis, M. Tardieu, pour me demander un service. Il a fallu que nous repartions pour Paris, par l’express de Saint-Pierre. Ce qui fait que j’ai trouvé votre carte postale et votre lettre en rentrant de Paris.

Mais pourquoi ne m’avez-vous pas averti (!) que vous veniez