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était venue me rejoindre à Genève. Après avoir fouillé et refouillé sans rien trouver, ils s’en allèrent.

Mais j’appris aussitôt qu’ils étaient passés à notre imprimerie : qu’ils y avaient « barboté » ce qu’ils avaient voulu, et y avaient mis les scellés. Ils avaient pris le propriétaire comme témoin.

On a beau brûler papiers et correspondances, il reste toujours quelque chose en quelque coin. Dans le rapport du Muller en question, je trouve qu’il avait été saisi à l’imprimerie, des lettres de Reclus, — elles ne devaient pas être nombreuses — un manuscrit de sa main, intitulé ; « La peur des Mouchards », relatif aux événements de Montceau-les-Mines.

Toute notre correspondance, j’allais oublier de le dire, était saisie à la poste.

Peu de temps après, Perrare, moi et Sadier étions appelés à comparaître devant Muller. J’ai oublié si c’était à l’Hôtel de Ville ou au Palais de Justice. Ce fut la première et unique fois que je pénétrai dans la vieille ville.

Arrivé là, on commença à me boucler dans une espèce de placard où je pouvais à peine remuer. On m’y laissa mijoter une demi-heure environ, Puis on vint me chercher pour me conduire auprès de Muller qui avait arboré son air le plus majestueux.

Il était assis à une table couverte de paperasseries et de divers objets hétéroclites.

Ce fut d’un ton assez rogue qu’il commença l’interrogatoire. Mais je déclinai toute réponse, protestant contre les tracasseries dont nous étions l’objet.

Après m’avoir posé les questions qu’il se croyait tenu de me poser malgré mon silence, il me montra un tube de cuivre, saisi à l’imprimerie, me demandant à quoi ça servait.

— À fondre les rouleaux en gutta qui servent à notre machine à imprimer — une minerve avec laquelle on faisait les petits travaux, quand, par hasard, il nous en arrivait.

Il sembla désappointé.