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Mes relations avec Vaillat, comme avec les autres camarades arrêtés, s’étaient, jusque-là, bornées à nos rencontres dans les réunions que, tous, nous fréquentions assidûment Nous avons toujours formé des associations ou des « bandes » qui ne se connaissaient presque pas ou même pas du tout.

Ayant constaté le vol dont j’avais été victime, je m’empressai d’écrire à M. Blancard des Salines pour réclamer mes brochures, m’appuyant sur le fait qu’elles circulaient librement en France depuis longtemps, qu’elles étaient ma propriété et n’avaient rien à voir avec le procès dans lequel on voulait nous fourrer.

J’attendis une dizaine de jours, et comme sœur Anne, ne voyant rien venir, j’écrivis à l’Intransigeant, au Citoyen et à la Bataille, pour en appeler au public :

Paris, 26 octobre 1882.
Citoyen,

Ayant vainement réclamé auprès du juge d’instruction, qui avait ordonné mon arrestation, la restitution des objets enlevés de mon domicile, je ne trouve rien de mieux que de m’adresser à l’opinion publique.

Je lui laisse le soin de qualifier ce fait, d’autant plus que la perquisition — il paraît que cela s’appelle une perquisition — a été faite en mon absence.

M. Fouqueteau, commissaire de police, est monté chez moi pendant que j’étais au poste de l’avenue des Gobelins. Il y est retourné à dix heures du matin, alors que j’étais au Dépôt, et il a fait main-basse sur mes journaux, mes brochures, deux manuscrits, l’un sur « La Propriété », l’autre sur « Le Suffrage Universel », et sur un revolver qui était dans le tiroir de ma commode. Notez que les journaux ont paru librement en France, et que les brochures ne sont, en aucune façon, interdites.

Bien à vous et à la Révolution.

J. Grave.

Quelques jours après la publication de ma lettre, j’étais appelé chez le commissaire de police de mon quartier. Je me présentai chez le monsieur qui me donna lecture d’une communication, par laquelle on m’informait que les objets saisis avaient été envoyés au procureur de Chalon-sur-Saône. Que c’était à lui que je devais adresser ma réclamation.