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gèrent après bien des contestations. Après quoi, ils s’en allèrent.

J’avais oublié l’affaire lorsque je fus appelé chez le commissaire du quartier.

Là, on me fit prêter serment de déclarer la vérité. Serment que je délivrai d’autant plus volontiers que, quel que soit ce que l’on me demanderait, je ne dirais que ce qu’il me conviendrait de dire.

— Les nommés Crespin et Ortiz s’étaient-ils rencontrés au bureau de La Révolte et s’y étaient-ils partagés des valeurs ?

Sans broncher, j’affirmai que je ne connaissais que vaguement ces messieurs et n’avais aucune connaissance de cette rencontre. L’interrogatoire ne fut pas poussé plus loin.

Mais de là, je conclus que le Crespin avait été arrêté, qu’il avait dû dénoncer son complice et que c’était pour contrôler ses déclarations que j’étais appelé en témoignage.

Et je compris ma bêtise d’avoir laissé ces deux « cocos » terminer leurs démêlés en ma présence, lorsque au procès des Trente, sur la liste des témoins, je vis figurer le nom de Crespin, détenu !

Je me grattai furieusement la tête : « Encore une tuile ! pensai-je ». Il est là pour raconter l’histoire de son entrevue au bureau du journal, et l’avocat-général en profitera pour dire : « Vous voyez bien qu’ils étaient tous complices ! C’était à la Révolte qu’on se partageait le butin ».

Ce fut un véritable soupir de soulagement lorsque, au procès, Crespin se retira, ayant terminé sa déposition sans qu’il fût question de l’entrevue.

Quant à la bande Bonnot, elle est relativement trop récente pour qu’on ne se la rappelle pas. D’elle, je n’ai également connu personne, si ce n’est un vague comparse, Gauzy, qui fut abonné aux Temps Nouveaux, et dont je suis encore à me demander comment il s’était fourvoyé là-dedans !