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XV

LES MOUCHARDS


Parlant des individualistes, cela m’amène à parler des mouchards, des cambrioleurs aussi. À qui donner la priorité ? Je suis bien embarrassé, car les trois catégories sont étroitement entremêlées.

Que tout mouvement révolutionnaire — voire même de simple opposition — soit contaminé par cette vermine, c’est inévitable. Plus les gouvernements sont combattus, plus ils ont recours aux moyens louches pour se maintenir. Savoir ce qui se passe chez leurs adversaires et tenter des diversions parmi eux, c’est tout indiqué. Qui dit mouchard dit agent provocateur. Cela encore découle de soi.

Si ces messieurs se bornaient à ne relever dans leurs rapports que ce qu’ils ont vu et entendu, ces rapports seraient fort ternes ; leurs employeurs ne tarderaient pas à s’apercevoir qu’ils n’en ont pas pour leur argent. Aussi, pour démontrer leur utilité et se faire valoir, messieurs les roussins ont-ils recours à un peu… d’imagination pour corser lesdits rapports.

L’imagination des mouchards, ordinairement, est fort restreinte. Tout de suite, ils sont orientés vers quelque complot, essayant de le mettre eux-mêmes sur pied, afin de donner quelque fondement à leurs rapports sensationnels. Il est toujours facile de trouver un exalté ou un détraqué qui se laissera entraîner à quelque imprudence qu’ils auront su lui suggérer, et dont la « découverte » pourra les faire bien noter et leur valoir de l’avancement.

Quelles que soient les dénégations des fripouilles qui les emploient, il n’est rien moins que sûr qu’elles-mêmes ne les encouragent pas à faire de la provocation.