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discutée et votée. Mais il y eut à batailler pour que les anarchistes fussent admis à en profiter.

Lorsqu’il fut à peu près certain que nous serions compris parmi les « amnistiables », Breton et moi fîmes nos paquets, nous tenant prêts à nous envoler sitôt que les portes de la cage nous seraient ouvertes.

Ce ne fut qu’au bout de trois ou quatre jours qu’arriva l’ordre de notre libération. C’était tard dans la soirée. Le gaz était gelé dans les tuyaux.

Comme il était tard, ou nous offrit de nous continuer l’hospitalité jusqu’au lendemain matin. Mais Breton brûlait de rejoindre sa femme à l’auberge. Et quoiqu’une nuit de plus ou de moins à la prison ne fût pas de grande importance, je me décidai à le suivre.

Pour nous conduire au greffe, pour la levée d’écrou, on nous fit passer par une partie de la prison que je ne connaissais pas. Ce devait être les ruines d’un ancien cloître. Il faisait un clair de lune superbe. C’était tout à fait romantique. Ça me rappelait le décor d’un vieux mélodrame que j’avais vu jouer au théâtre Saint-Marcel : Le Monstre et le Magicien.

Pendant que nous attendions l’arrivée de l’ordre de libération, le directeur et l’inspecteur étaient venus nous féliciter. L’inspecteur qui, sans doute, par le greffe, connaissait ma situation de fortune me fit l’offre de me prêter la somme dont je pourrais avoir besoin. C’était très gentil de sa part, mais, évidemment, tout gentil qu’il était, il était le dernier duquel j’aurais accepté ce service.

Je le remerciai donc de son offre. J’avais écrit à Gauche pour lui demander 40 francs pour payer mon voyage. Arrivé à Paris, je pouvais vivre chez les Benoît en attendant de me retourner.

Les formalités accomplies, nous nous rendîmes à l’auberge. Nous y trouvâmes Cardanne envoyé par le Figaro. Après quelques mots, Breton nous quitta pour aller rejoindre sa femme. Il devait venir nous rejoindre après le souper.

Cardanne me raconta que c’était Émile Gautier qui avait demandé l’envoi d’un rédacteur du Figaro à Clairvaux.