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« Comment trouvez-vous le monsieur qui gagne sa vie à demander la tête des autres, et qui le fait sachant qu’il n’y a nul danger pour lui ? »

« Ces dernières explosions n’auraient-elles eu d’autre effet que de jeter ces individus bas de leur prétendue mission sociale, nous les montrant gagnant leur vie à faire couper des têtes comme d’autres font des cannes ou des manches de parapluies, qu’elles auraient encore du bon ».

Bulot n’oublia pas cet entrefilet — assez mal bâti lorsque je le relis — et il me le rappela dans son réquisitoire contre la Société mourante et dans le Procès des Trente.

On n’avait relevé aucun indice sur les auteurs de ces attentats ; mais tout de suite, on sut que c’était Ravachol. Quelqu’un, évidemment, avait mangé le morceau. Par la suite, il fut prouvé que l’un de ceux qui étaient dans la confiance de Ravachol, le nommé Chaumartin, s’était vendu à la police.

Ce Ravachol avait la police à ses trousses pour plusieurs méfaits accomplis dans la région de Saint-Étienne.

C’était, d’abord, le meurtre d’un vieil avare, vivant de mendicité et connu sous le nom d’Ermite de Chambles, la localité où il vivait. Puis, c’était la violation de la sépulture d’une vieille femme que l’on disait avoir été enterrée avec ses bijoux et pierreries.

Ces affaires firent grand bruit dans la région lyonnaise et stéphanoise. Beaucoup d’anarchistes étaient convaincus que Ravachol n’avait perpétré ces actes qu’en vue de fournir de l’argent à la propagande.

Plusieurs anarchistes avaient même été arrêtés comme complices. Mais, lorsqu’ils passèrent en jugement, l’attitude de ces comparses fut si piteuse, se rejetant mutuellement leur responsabilité, que cela nous dégoûta et nous rendit injustes envers Ravachol.

Ce fut sous l’impression du compte rendu de ce procès que Kropotkine m’envoya, là-dessus, deux articles intitulés : « Affaire de Chambles », où il disait tout son dégoût.

Cet article nous amena des lettres de camarades, de