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LA SOCIÉTÉ MOURANTE

on la bafoue, on la viole quand on le peut, et on se croit perdu lorsqu’on parle de la supprimer.

Affaire d’habitude, à ce qu’il paraît !

Mais ce préjugé est d’autant plus illogique, disons le mot, d’autant plus bête, que l’idéal de chaque individu, en fait de bon gouvernement, serait d’en avoir un qu’il aurait la facilité d’envoyer promener, du jour où celui-ci voudrait l’empêcher d’agir à sa guise. C’est pour flatter cet idéal que la bourgeoisie a inventé le suffrage dit universel.


Si, parmi les travailleurs, la République a eu tant de crédit ; si, après tant de déceptions, le suffrage universel est considéré encore par les gouvernés, comme moyen d’affranchissement, c’est que l’on est arrivé à leur faire croire qu’en changeant les hommes au pouvoir, ils pouvaient changer le système d’exploitation qui nous opprime, en un système d’où découleraient le bien-être et la félicité pour tout le monde. Erreur profonde qui permet aux intrigants d’égarer les travailleurs à la poursuite de réformes illusoires, ne pouvant amener aucun changement dans leur situation, et les habituant à tout attendre d’un changement de personnel dans cette machine à l’opprimer qui s’appelle l’État. Erreur qui, à chaque révolution, a permis aux intrigants d’escamoter les victoires populaires, de s’installer dans les sinécures de ceux que la tourmente révolutionnaire avait balayés, et de former une