Page:Grave - La Société future.djvu/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fices entre les mains des travaiJleurs, elles leur font espérer une accumulation de capitaux qui en fera autant de rentiers ; en leur donnant la possibilité d’exploiter les autres, elles leur font espérer un affranchissement personnel qu’ils poursuivent à tout prix, au détriment de Leurs frères de misère. Les sociétés de secours mutuels, d’assurance sur la vie, loin d’être une pratique de solidarité, ne font que mettre en jeu l’égoïsme le plus étroit, car celui qui s’amuse à être malade trop souvent, est écarté de l’association qui ne peut être prospère que si elle a peu de malades. Quant aux sociétés qui se proposent de donner, au bout d’un certain temps, des rentes à leurs adhérents, cela est bien mieux, chacun souhaite voir périr ses coassociés avant qit’ils arrivent à l’âge de toucher les rentes, celles-ci ne pouvant se payer que si la disparition d’un certain nombre d’ayants-droit a eu lieu.

Dans une association évoluant sur les bases que nous venons de dire, c’était la mise en pratique de la solidarité, de l’aide mutuelle, telle que nous l’entendons ; les individus auraient pu y trouver un adoucissement à leur sort, sans y prendre cet amour du lucre que donnent les organisations capitalistes ; ils y auraient appris à se traiter en frères, à attendre leur satisfaction du bonheur de tous, au lieu de ne voir en chaque associé qu’un ennemi, dont la part qu’il prend dans les productions rogne d’autant la part des autres.

Si cette tentative eût réussi et se fût développée sur une certaine étendue, on ne peut prévoir les perturbations que cette façon d’opérer eût apportées dans le monde bourgeois, sans être pour cela en antagonisme avec aucune des lois existantes.