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la loi apporte à son évolution naturelle, on nous accuse de vouloir en détruire les sentiments affectifs ; adversaires du patriotisme étroit qui fait considérer les peuples comme des ennemis, partisans de la fraternité universelle, on nous accuse de prêcher l’abaissement de notre pays sous ses voisins et à la haine de nos compatriotes !

Il faudrait s’entendre. Nous savons que l’homme éprouvera toujours certaines préférences. Il aimera à se rappeler les lieux où il aura vécu, où il aura été heureux, où se seront développées ses affections. Un sentiment de bienveillance particulière le portera toujours vers les lieux où il sera sûr de posséder des amis. Et cette sympathie, cet amour peuvent se porter sur la contrée la plus ingrate, aussi bien que sur une contrée fertile et enchanteresse. Quand on dit que l’on aime tel pays, ce sont les souvenirs qu’il vous rappelle, les émotions qu’il vous a fait éprouver, les amis que vous y avez laissés, c’est à tout cet ensemble de choses que se rapporte cet attachement et non au sol pour lui-même.

Si les hommes croient devoir être plus attachés à l’endroit qui les a vus naître, pour le seul fait qu’il leur rappelle leur naissance, quel mal y a-t-il, et qui aurait jamais eu la pensée de combattre ce sentiment ? Connaissons-nous toujours bien distinctement tous les mobiles qui dictent nos sentiments ?

Mais parce que nous aimons davantage telle ou telle localité, est-ce bien une raison de considérer les habitants des autres pays comme des ennemis ? Si le patriotisme était le sentiment exclusif du sol, du pays où l’on est né, il n’y a pas de raison pour qu’il s’étende à toute une contrée, comme la France, l’Alle-