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Mais la Révolution de 89 nous montre aussi de quoi est capable un peuple qui défend ce qu’il croit être sa liberté. Les hommes qui se battent pour une idée sont invincibles lorsqu’ils n’ont à lutter que contre des automates, et la conviction de défendre son foyer, son indépendance vaut bien des bataillons.

Les partisans de l’autorité nous répliqueront que la République de 89 était une nation fortement centralisée, qu’elle sut défendre son unité, même contre les ennemis intérieurs, et que c’est pour pouvoir se défendre, comme elle, contre les entreprises extérieures et intérieures, qu’ils réclament une organisation semblable.

Pour que l’argument des autoritaires fût vrai, il faudrait bien étudier la philosophie de l’histoire de cette époque et se rendre compte si ceux qui se montrent à nous, sous les traits des plus farouches partisans de l’autorité centrale, ne subirent pas, plus d’une fois, à leur insu, la pression de la foule anonyme ? Si ce ne fut pas à partir du moment où l’initiative individuelle fût complètement étouffée, la foule réduite à l’impuissance que date la décadence de la Révolution pour se terminer par sa chute sous le talon d’un soudard ?

Mais cela importe peu à notre argumentation. Quelle que fût l’énergie de ceux qui avaient la direction des affaires, leur science aurait-elle été encore cent fois plus grande, elles auraient pesé de peu, s’ils n’avaient été secondés par l’énergie de ceux qui restèrent anonymes, qui surent les forcer, plus d’une fois, à prendre les mesures nécessaires au salut de tous et surent aussi les exécuter de leur propre initiative sans attendre l’assentiment des chefs.