Page:Grave - La Société future.djvu/398

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

contre la nature qu’il n’avait pas encore appris à connaître, il était porté à la déifier dans ses phénomènes dont il ne comprenait pas les causes ? L’homme était-il libre alors qu’il était contraint de courir à la recherche de sa nourriture et de la disputer aux grands carnassiers qui le surpassaient en force ? Quelle somme d’autonomie pouvait-il déployer, forcé qu’il était de soutenir, à tous moments, le rude combat de l’existence ? Et le spectacle des races, dites inférieures, de nos jours nous montre bien, en effet, qu’il n’y a pas d’autonomie quand l’homme est contraint de tenir constamment en éveil le peu de facultés qu’il possède afin de pouvoir satisfaire ses besoins matériels.


Nous reconnaissons, certainement, que les grandes découvertes telles que celles de la vapeur, de l’électricité, ont comblé les fossés qui séparaient, jadis, communes et nations, pour donner essor à la solidarité universelle ; mais de ce que les travailleurs sont forcés d’associer leurs efforts pour vaincre les obstacles que leur oppose la nature, il ne s’ensuit pas que leur autonomie fût amoindrie dans le sens d’une subordination quelconque. — Les communes et les nations étant, désormais, en rapports continuels, toute autorité servant à établir ces rapports et imposant sa volonté pour socialiser les efforts des individus et des groupes devient de plus en plus nuisible.

Si, aux premiers temps de l’humanité, la fédération des groupes isolés et la socialisation des efforts s’est faite par l’intermédiaire d’une autorité extérieure, cette solidarisation se fait, aujourd’hui, spontanément sans porter atteinte à l’autonomie des groupes, et c’est précisément grâce à la vapeur et aux progrès de la