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de supprimer purement et simplement. Ce qui n’a fait que compliquer la chose et à nous enserrer de plus en plus, dans un réseau inextricable de décrets, lois et règlements qui étranglent celui qui s’y laisse tomber.

Lorsque la tradition et la coutume régissaient les relations sociales, ce pouvait bien être, en quelque sorte, la régentation des vivants par les morts, mais les coutumes, les mœurs se transforment insensiblement, et, chaque époque, vient, à la coutume ancienne, ajouter sa marque particulière. Ce qui n’est pas écrit, ce qui n’est qu’accepté, et non imposé, se transforme avec les mœurs.

La loi écrite est immuable ; on peut la torturer pour lui faire dire, et on y arrive, ce que n’ont jamais pensé ceux qui l’ont formulée, mais plus elle est élastique, plus elle est terrible, car ceux qui sont chargés de l’appliquer n’en ont que plus de facilités pour l’accommoder au mieux de leurs intérêts. C’est ce qui fait, qu’au milieu de nos révolutions, ceux qui, la veille, étaient frappés par la loi existante, pouvaient, le lendemain, avec la même loi, le même corps judiciaire, frapper leurs persécuteurs de la veille. C’est ce qui fait aussi que tant de lois blessent le sentiment public, continuant à régir nos relations, car ceux qui sont au pouvoir ont intérêt à éterniser les préjugés qu’elles représentent.

On a voulu objecter, que, dans les pays où règne la coutume, tels que la Corse, la Kabylie, les actes de vengeance individuelle, rendaient la vie cent fois plus difficile que là où règne le châtiment juridique ; ne vous mettant nullement à l’abri du ressentiment de la partie lésée et que le meurtre se poursuivait ainsi, englo-