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d’évoluer comme ils l’entendraient, n’ayant aucune contrainte à subir, ayant la satisfaction de leurs besoins assurés, nous ne les voyons pas bien, s’enrôler au service des bourgeois, puisque les promesses que ceux-ci pourraient leur faire seraient bien au-dessous de ce que les autres pourraient se procurer eux-mêmes.

Ou les institutions bourgeoises disparaîtront dans la lutte, et alors les travailleurs auront goûté aux bienfaits du nouveau régime et sauront le défendre, ou bien les bourgeois seront encore une force, mais alors c’est que la révolution ne sera pas terminée, ce sera la lutte encore, il y aura de la besogne à faire, mais cette besogne sera l’affaire des révoltés eux-mêmes, et non celle d’un gouvernement.


Avec un pouvoir constitué, le danger serait bien autrement grand. La possibilité que pourraient avoir les rétrogrades de s’en emparer par ruse ou par force, et de disposer des forces vives de la collectivité pour les retourner contre elle, serait bien autrement redoutable.

Les travailleurs n’iront jamais, d’eux-mêmes, remettre le cou sous le joug, mais la révolution, par contre, ne sera toujours que l’œuvre d’une minorité consciente, qui entraînera la masse derrière elle, par son exemple et sa conviction. Cette masse s’instruira, s’éclairera, mais, provisoirement encore, elle ne sera que trop portée à obéir à ceux qu’elle croira ses chefs. Le seul moyen de parer au danger est de ne pas la laisser s’en créer. Livrée à elle-même, elle saura s’inspirer des circonstances et trouver l’organisation qu’il lui faut.