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que nos idées ne sont pas comprises de la masse. Si elles l’étaient, nous n’aurions pas à nous évertuer à les lui faire entrer dans la tête. Si le peuple en comprenait la portée, il n’aurait pas besoin de nous pour la lui faire entrevoir.

Et si chacun de nous selon ses facultés, selon ses moyens cherche à développer cet idéal de félicité, c’est pour que les individus se l’assimilent, s’en imprègnent assez pour avoir la tentation de le réaliser. Et c’est quand cette imprégnation d’idées nouvelles est assez puissante dans les foules qu’éclatent les révolutions.

Mais revenons aux arguments de nos bonshommes :

Pour certains socialistes, la révolution est inévitable, mais pour leurs idées seulement. Comme les bourgeois qui croient avoir fermé l’ère des révolutions en 93, ces nouveaux Robespierre pensent avoir fermé, eux, le cerveau des individus sur leurs seules conceptions.

« Vos idées ne sont pas réalisables », nous disent-ils, « avec le tempérament français », — en France ou bien anglais en Angleterre — « Certainement, votre idéal de société est magnifique en théorie, mais absurde en pratique. Mais, pauvres amis ! vous ne connaissez pas l’homme pour parler comme cela ! Ah ! si vous le connaissiez comme nous, (c’est un drôle d’animal allez, il est bien trop bête pour savoir ce qu’il veut. Heureusement que nous le savons pour lui !) — Quand une période transitoire aura perfectionné l’humanité, émoussé les instincts mauvais de l’homme, peut-être, alors — pas sûr encore ? — vos idées pourront-elles être appliquées sans inconvé-