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tant que dure le caprice, quelques égards et lui rendre l’exploitation moins dure, mais une fois le caprice fini, comme les camarades, il faudra qu’elle turbine sans broncher, et l’exploitation est dure dans ces enfers, les générations sont fauchées avant de venir bien vieilles. Les mâles qui arrivent à l’âge d’homme, s’ils sont peu nombreux, n’en sont pas plus robustes.

Égarés par l’espoir, toujours déçu pourtant, d’obtenir des concessions de la classe possédante, inquiets, quoiqu’ils n’aient rien à craindre des résultats d’une révolution dont ils n’aperçoivent pas les avantages et qui ne peut les rendre plus misérables, les travailleurs reculent effrayés à l’idée d’engager la lutte.

À l’instar des bourgeois, quand on leur fait envisager une société où ils seraient libres d’évoluer, où ils auraient la facilité de satisfaire tous leurs besoins, ils hochent tristement la tête et trouvent que ces idées sont trop belles pour être réalisables.

Ils ne veulent pas voir que la force des événements les entraîne à la lutte quand même, que la misère, l’abrutissement et l’excès de travail les tuent aussi sûrement qu’une balle de fusil, que plus ils se résigneront, plus l’exploitation pèsera lourd sur eux, et que, s’ils n’ont pas l’énergie de vouloir s’affranchir, ce ne sont pas leurs exploiteurs qui viendront bénévolement briser leurs fers.

« Vos idées ne sont pas réalisables », disent-ils. En effet, elles ne le seront jamais, tant que ceux qu’elles intéressent seront assez stupides pour endurer un ordre de choses qui les tue, trop lâches pour user de leurs forces pour réaliser cet idéal qu’ils trouvent « trop beau. »

Hélas ! cet idéal d’amour et d’harmonie que nous