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de centimètres et, d’un coup sec, la renverser du côté de l’autre lit pour la faire basculer. Un mouvement pour tirer le lit, un autre pour le retourner, et le dormeur brusquement précipité à terre, la tête cognant sur le carreau, empêtré dans ses draps et couvertures, en était encore à se demander ce qui lui arrivait, que le « farceur » était loin.

Nos imbéciles prirent goût à ce jeu : ils guignaient chacun un dormeur, renversaient le lit, et, pieds nus, couraient se cacher dans la chambre de Bouzillon, pendant que le soldat, brusquement réveillé par sa chute, cherchait, tout en jurant, à remettre son lit en ordre.

Une dizaine de lits déjà avaient été renversés, et la nuit menaçait de se passer dans ces « amusements ». Les hommes culbutés gueulaient ferme, mais, voyant qu’ils avaient affaire à des gradés, se recouchaient en ronchonnant, n’osant passer les farceurs à la couverte, ce qu’ils n’auraient manqué de faire à un des leurs. Puis, les culbutes de nouveaux souffre-douleur finissaient par les égayer à leur tour.

Caragut étant resté éveillé tout le temps, vit à un certain moment, une ombre se dirigeant vers son lit, il ne dit rien, mais allongeant doucement son bras au-dessus de sa tête, saisit l’un de ses godillots suspendus à une patère et le lança de toute