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sant comme un cordon de feu, qui oscillait selon les ondulations de la marche.

Au départ on avait bien entonné les refrains ordinaires, mais bientôt, les voix s’étaient assourdies, les chants avaient cessé, les plus frustes subissaient, instinctivement, l’harmonie du silence. On n’entendait plus que le pas cadencé des soldats.

On ne distinguait rien autour de soi, les formes se faisaient indécises ; la fraîcheur de l’air succédant à la chaleur du jour, les étoiles scintillant au ciel, tout dégageait un charme mélancolique que chacun ressentait plus ou moins et qui rendait la colonne tout à fait silencieuse.

La mauvaise disposition de Caragut s’était dissipée complètement. Entièrement au charme présent, il aspirait la fraîcheur de la nuit, se laissant envahir par une molle langueur.

Tous les hommes, du reste, semblaient plongés dans une sorte de rêverie, car tous se taisaient ; le frisselis du feuillage doucement agité par la brise, les aboiements de quelques chiens isolés, que, de temps à autre, l’écho apportait, assourdis, de quelque ferme lointaine, une horloge sonnant lentement les heures à quelque clocher voisin, étaient les seuls bruits qu’on entendait.

Sauf l’agacement que produit, à la longue, le sac descendant des épaules, engourdissant le bras qui