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à l’heure qu’il est, avec une fille de chez nous qui m’apportait pour dix mille francs de biens au soleil. Je serais chez moi, tranquille, à mon aise, soigner mes bestiaux, au lieu que le père est forcé, en mon absence, de prendre un domestique pour travailler nos champs.

Ma bonne amie m’a bien promis de m’attendre, mais en cinq ans elle a le temps de changer d’avis, d’autant plus qu’elle ne manquait pas de galants. Je ne retrouverai certainement pas un parti semblable si elle m’échappe.

— Et moi, interrompit le Lyonnais, on m’avait promis une place dans un grand magasin où je n’aurais eu qu’à me laisser aller pour arriver, en peu de temps, à avoir une très belle situation. Au lieu de cela me v’là avec un fusil dans les pattes, avec un sou par jour. Et tout ça ! pour aller garder des pays dont je me fous comme de l’an quarante.

— Il est de fait, dit Brossier, que ce n’est pas juste. S’il y a besoin de soldats, pourquoi que l’on ne fait pas comme en Angleterre : ne prendre que des volontaires ? Il n’y aurait qu’à bien les payer, on n’en manquerait pas.

— Ça, murmura Mahuret, entre ses dents, j’en doute fort. Il pourrait y avoir du mécompte.

— On a besoin de soldats pour défendre la France, fit le premier qui avait parlé, du nom de Saillant,