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Les litres d’absinthe s’étaient succédé. Au plus fort de l’ivresse Gélinier remarqua que ça manquait de femmes. On avait l’habitude de peloter l’hôtesse qui, peu farouche, se laissait faire. Mais ce soir-là, n’étant pas disposée sans doute, ou notre nombre l’ayant effrayée, aux premiers attouchements de Gélinier, la congaï se rebiffa. L’homme s’en étant mêlé, reçut son compte, et la femme fut culbutée par Gélinier d’abord, par chacun de nous ensuite qui voulions avoir notre part des faveurs — légèrement forcées, il faut en convenir — de la belle qui se débattait, gueulant comme un putois.

Au beau milieu de nos ébats, la lampe avait roulé à terre et mis le feu à la cahute, sans qu’on s’en aperçût. Mais quand les flammes se mirent à jaillir, effrayés par le boucan que ça allait faire, nous nous enfuîmes, laissant tout griller, heureux de rentrer à la caserne avant que l’on se fût aperçu de notre absence.

Laugère, lui, raconta l’histoire d’une jeune Annamite qui venait parfois vendre des provisions au poste détaché où il était de garde avec une douzaine de camarades, sous le commandement d’un sergent.

Un jour qu’elle offrait des pastèques, le sergent qui était saoul comme une bourrique, commença à la chahuter : elle résista, il devint brutal et