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rent aux portières et firent des amabilités — de troupier — aux femmes pour les décider à monter dans leur compartiment. Elles s’aperçurent heureusement à qui elles avaient affaire et s’empressèrent de monter dans d’autres wagons.

Moins perspicaces, deux pauvres diables de paysans bretons vinrent se fourrer dans ce guêpier, ils eurent à s’en repentir.

Pendant qu’on les faisait parler en ayant l’air de s’intéresser à leurs récits, un farceur vidait une bouteille dans la gouttière formée par les bords relevés du chapeau de l’un d’eux, y jetant ensuite des bouts de papier en guise de petits bateaux. Le paysan remuant la tête, le vin lui dégoulina sur les genoux ; surpris de cette cascade, il se redressa brusquement, ce fut dans le dos que lui coula l’averse.

Comme il se fâchait, on se mit à le houspiller, puis on l’empoigna, voulant le « passer à la patience, » mais le sergent craignant un avaro pour lui, s’étant interposé, on se contenta de l’empoigner par les jambes et de se le faire passer de main en main. Eh bien quoi ! ne faut-il pas rire un brin ? à quoi serait bon le pékin, si le troupier ne pouvait s’en amuser un peu ? Heureusement que le train entrait dans une gare, le paysan put se dégager et changer de compartiment.