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voir une vision nette des choses. Mais, on ne saurait trop y insister, les conditions économiques sont telles que la plupart ne peuvent dire tout haut ce qu’ils pensent, et que le simple fait de venir, chez nous expliquer leur façon de concevoir les choses, les aurait mis dans l’impossibilité de trouver à gagner leur vie.

Lorsqu’on est seul, on peut se permettre le luxe d’être indépendant. Cela ne dépend plus de nous seul, lorsque d’autres êtres dépendent de notre travail. Et comme l’état de notre caisse ne nous permettait pas de payer les bonnes volontés que nous sollicitions, on comprend les difficultés.

Mais il y en a d’autres qui n’ont pas les mêmes excuses. Dans les sciences, dans les arts, dans la littérature, nombreux, sont ceux qui se laissent entraîner à des aveux édifiants, à formuler nos conclusions, à exprimer nos aspirations, à faire plus acerbes les critiques que nous formulons contre l’organisation qui nous écrase.

Seulement, lorsqu’on va leur demander de se joindre à ceux qui cherchent à réaliser ces aspirations, à combattre la cause des maux si bien décrits, à appliquer au régime économique les vérités scientifiques si clairement exprimées, bernique ! la plupart de ceux-là reculent effrayés !

Ils veulent bien consentir à formuler des vérités ; mais à condition qu’on ne cherche pas à en tirer aucune application pratique : Justice, Progrès, Solidarité, Initiative, grands mots avec lesquels ils veulent bien jongler, auxquels, au besoin, ils mettront des capitales ; mais à condition que cela, pour eux, reste toujours matière à discours. Ils n’en sont