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gré que, aujourd’hui, grâce à la persécution, grâce à des lois d’exception, telles qu’on en fait dans les pires monarchies, les noms d’anarchie et d’anarchistes ne soient ignorés de personne, il y en a peu encore qui sachent au juste ce que c’est que l’anarchie.

Dans l’affaire Dreyfus, où se sont beaucoup produits les anarchistes, leur intervention a bien eu pour effet de les mettre en contact avec des bourgeois politiciens qui les ignoraient totalement, mais l’anarchie n’en est pas sortie plus claire.

Anarchie, pour les uns, c’est le vol, l’assassinat, les bombes, le retour à la sauvagerie ; les anarchistes ne sont que des cambrioleurs, des paresseux qui voudraient mettre toutes les richesses en commun afin de pouvoir se goberger à rien faire.

Pour d’autres, l’anarchie est une espèce d’utopie, de rêve d’âge d’or que, volontiers, on reconnaît très beau, mais un rêve bon tout au plus à illustrer des livres de morale, ou de constructions sociales fantaisistes ; les plus cléments, envisagent l’anarchie comme une vague aspiration qu’ils ne font aucune difficulté à reconnaître désirable pour l’humanité à atteindre mais si parfaitement inaccessible qu’il n’y a pas à se préoccuper outre mesure de la réaliser, et les anarchistes, comme une variété de fous, dont il est bon de se garer ; comme de pauvres illuminés qui perdent de vue les sentiers pratiques pour se perdre dans le vague de l’utopie.

Ils sont peu nombreux ceux qui savent que l’anarchie est une théorie s’appuyant sur des bases rationnelles, que les anarchistes sont des hommes qui, ayant recueilli les plaintes de ceux qui souffrent de l’ordre social actuel, s’étant pénétrés des aspira-