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L’Urugay.

sans chien, surtout à la tombée du jour, on peut en tuer beaucoup. Poussé par mon ardeur chasseresse, je m’étais éloigné de la Capilla de cinq à six kilomètres, et à pied, tout en chassant ces gallinacés. J’étais chaussé de grosses bottes en cuir de Russie, je n’avais pas remarqué tout d’abord qu’elles me blessaient, effet de la chaleur sans doute. La douleur devient plus forte, de plus en plus insupportable, à tel point que je ne peux plus avancer. Que faire ? Farrucco était encore loin. Je quitte mes chaussures, les mets en bandoulière, et me voilà piétinant l’herbe avec les bas. Ah ! lecteur, vous dire ce que j’ai souffert, vous ne le pourriez croire : les prairies sont remplies de chardons, et d’une petite plante particulière appellée roseta ; mes pauvres pieds ! À chaque instant j’étais obligé de m’arrêter pour les débarrasser d’une quantité d’épines fines et aiguës. Après avoir souffert comme un martyr, les pieds tout ensanglantés et gonflés, je parvins à me traîner jusqu’à la Capilla.