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L’Urugay.

terre le premier qui aurait levé la main. Une vingtaine de mètres nous séparaient. J… s’avance hardiment, tire son couteau, coupe les lanières de cuir qui retenaient nos bêtes captives, et leur fait rebrousser chemin. Aucun des gredins n’osa dire mot, et ils eurent raison, car certainement leur sang eût rougi la prairie. Nous rentrâmes fort satisfaits, car cette scène eut pu prendre une tournure tragique.

Tio Luis, grand nègre né en Afrique, au Congo, d’une stature et d’une force athlétiques, malgré son âge avancé — car les tire-bouchons de sa chevelure étaient gris, et quand un nègre grisonne, on peut dire qu’il est vieux — était conservé à la Capilla plutôt par compassion, que pour les services qu’il était à même de pouvoir rendre ; il s’occupait du verger, et surveillait les semis de maïs et de pastèques. C’est lui qui me fit manger les premiers melons d’eau, sandia ; il prétendait que pour être bons, il fallait les cueillir à la pointe du jour, et les manger sur place ;