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NE SONT PAS LONGTEMPS UNIS.

grappe de raisin, le voyageur s’étendit sur un tas de mousse à l’ombre.


— Voilà le meilleur déjeuner que j’aie fait depuis longtemps ! s’écria-t-il.

— Il ne tient qu’à vous d’en faire tous les jours autant, reprit le chardonneret ; vous n’avez qu’à vous établir dans ce canton.

— Si mes frères les étourneaux se doutaient des repas qui les attendent ici, je crois qu’ils ne demanderaient pas mieux.

— Ah ! vous êtes étourneau ?

— De père en fils. Je suis né en Germanie ; à six mois j’avais déjà vu la moitié de l’Europe. Me trouvant au bord de la mer, aux colonnes d’Hercule, j’ai profité de l’occasion d’un coup de vent qui m’a conduit dans l’île de Calypso ; là, je me suis marié. Ma femme étant morte au bout de cinq semaines, j’ai repris mon vol. En Égypte, je me suis rencontré avec une compagnie d’étourneaux en train de faire le tour du monde ; ils m’ont engagé à les suivre, et nous sommes partis il y a quelques jours. Quand vous m’avez aperçu, je prenais le frais en attendant l’occasion de prendre autre chose.

— Et vos camarades ?

— Ils font la sieste dans le bois. Venez avec moi ; je vous présenterai à toute la bande, qui sera enchantée de faire votre connaissance.


Le chardonneret n’avait jamais quitté ses bosquets ; il croyait que toute la terre ressemblait à ce séjour qui faisait