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TROUVE SON NID BEAU.

mière ? Non, Monseigneur, je la trouve plus belle que vos palais. À quoi bon les diamants, quand on a les fleurs de la prairie ? À quoi servent les titres, quand on a déjà le bonheur ? D’autres recevront avec plaisir vos hommages, elles seront heureuses et fières d’être duchesses ; moi je veux être toujours votre vassale, Monseigneur. Je viens de l’apprendre tout à l’heure, chaque oiseau trouve son nid beau ; moi, je dis comme les oiseaux, et je reste dans ma chambrette.

L’écho lointain répéta les sons d’une musette. On eût dit que Colin chantait pour remercier Colette.

Le seigneur s’était éloigné triste et baissant la tête, car il aimait la jeune fille.

La bergère descend pour se mêler aux danses qui terminent les travaux de la journée. Jamais le ménétrier n’a été plus en train. Voici l’instant où le danseur embrasse sa danseuse ; on s’arrête un instant, puis la danse recommence. Le gai ménétrier fait entendre une seconde fois le trille impératif ; il faut que tout le monde obéisse. La ronde villageoise a noué la main de Colette à celle de Colin ; elle rougit, son sein palpite ; le berger, non moins ému, presse doucement les doigts qu’on lui confie ; il l’entraîne sous l’ormeau, il lui peint son amoureux délire, il lui parle des dangers que l’amour du seigneur lui fait courir ; il est si pressant, si tendre, si éloquent, que la jeune fille ne lui répond que par des soupirs.

— À quand notre mariage, Colette ?

— À demain, Colin.

Dix heures sonnent à l’horloge de l’église. Les fauvettes se sont endormies sur leur édredon, les moineaux sur leur litière de fleurs ; l’hirondelle, pour être prête au premier