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IL FAUT AMADOUER LA POULE

régulier, correct ; plus de perruques de débardeur, de la distinction, de la tenue, gants serin à 29.

Zéphyrin s’approcha familièrement de madame Louchard, et, après avoir retouché sa coiffure, lui adressa quelques paroles à l’oreille. Celle-ci sourit agréablement, et dit, en se tournant vers la cantonnade :

— Mesdemoiselles, c’est demain dimanche ; M. Zéphyrin veut bien vous inviter à une promenade à Romainville… Il y aura des ânes…

Il faudrait connaître la langue musicale de M. Sudre pour rendre l’accent d’amertume et de raillerie avec lequel cette phrase fut prononcée. Euphrosine ne répondit pas ; elle avait pris son parti : tout cela était évidemment trop mesquin.

— Non, non, s’écria-t-elle dès que le fiacre se fut éloigné, ce n’est plus la mort cachée, ignorée, qu’il me faut ; c’est la mort en plein vent, à la campagne, à la face du ciel, sous tes propres yeux, monstre !… Demain, il y aura des ânes, dis-tu, à Romainville ; eh bien ! je choisirai l’animal le plus fougueux, le plus sauvage, et je veux qu’il m’entraîne n’importe où… J’irai finir ma vie dans le fond de quelque précipice… comme Mazetta

La journée du lendemain fut pour la sensible Euphrosine une série de chagrins et de vexations. Elle eut le plus mauvais âne de la société ; un de ces ânes sans amour-propre, que, ni la persuasion, ni les épingles, ne peuvent faire marcher.

Madame Louchard triomphait au contraire ; Zéphyrin n’avait d’attentions et de cajoleries que pour elle. Il s’était fait son premier écuyer. Madame Louchard était montée