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RIEN N’EST BON

— Que dirait le docteur s’il vous voyait dans cet état ? dit M. de G. en rentrant.

— Il dirait, répondit-elle, que j’ai un peu enfreint son ordonnance. Mais que nous importe ? nous ne le verrons pas ; ne partons-nous pas demain pour la campagne ?

On était alors au commencement du printemps, et le comte de G. avait l’habitude à cette époque-là d’aller s’établir dans un magnifique château qu’il possédait dans les environs de Compiègne.

Madame de G. parut plus heureuse encore que de coutume de quitter Paris. Mais elle était installée au château depuis deux jours à peine, qu’elle avait déjà pris l’habitude de ne descendre de sa chambre que vers deux heures de l’après-midi. Chaque matin, le jardinier lui montait en cachette un bouquet de fleurs les plus belles et les plus variées. Le comte ne tarda pas à découvrir que sa femme employait toutes ses matinées à peindre ; il rendit des actions de grâces au docteur.

La fête de M. de G. se trouvait être à la fin du mois de juillet. La veille de cet anniversaire, il vit paraître devant lui madame de G., qui lui offrit d’un air embarrassé un magnifique album qu’elle venait d’achever. M. de G. se mit aussitôt à le parcourir, et quel fut son bonheur en remarquant qu’il était rempli de fleurs peintes avec un goût charmant !

— Vous allez me gronder, dit-elle ; j’ai voulu remplir cet album malgré les ordres du médecin.

— Non, ma chère Juliette, s’écria M. de G. en l’embrassant au front, car vous saurez que cette prétendue défense de mon ami L. n’était qu’une ruse de sa part des-