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C’EST QUAND L’ENFANT EST BAPTISÉ

la scène, avait déjà gagné une courbature à force de révérences.

Les deux derniers actes confirmèrent le succès du premier : jamais pièce plus singulière ni plus intéressante n’avait été offerte au public de San-Carlino. On voulait porter le directeur en triomphe ; mais il avait eu le soin de se blottir derrière la toile du fond, afin de se dérober aux démonstrations de l’assemblée délirante.

Ce fut là que le trouvèrent les poètes qui s’étaient empressés de franchir les banquettes pour se rendre sur le théâtre.

Burchiello prit le directeur à part, et lui dit :

— Vous savez que c’est moi qui suis l’auteur de la pièce ; c’est un ancien canevas que j’avais remis autrefois à votre prédécesseur. Je n’ai pas voulu vous l’avouer pour ne pas me séparer de mes confrères ; mais à partir de demain, je vous autorise à mettre mon nom sur l’affiche.

— Point du tout, interrompit Pandolfo, c’est mon nom qui doit être imprimé ; n’ai-je pas reconnu plusieurs scènes qui ne peuvent appartenir qu’à mon répertoire ?

— Voilà qui est un peu fort, criait de son côté le poète Dottori ; oser dire que la pièce n’est pas de moi quand tous les lazzis de Pulcinella et les bons mots de Casacciello sont de mon invention !

— Messieurs, Messieurs, dit Geronimo qui ne savait comment se débarrasser de cette nuée de poètes criant tous à la fois, je vais vous mettre d’accord en vous déclarant que la pièce appartient à vous tous, et que si mes pauvres acteurs ont eu le bonheur de réussir, c’est qu’ils se sont souvenus des mots charmants et des excellents traits