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IL NE FAUT PAS BADINER

— Madame ?

— Mon mari est-il prêt ?

— Madame, M. le comte n’est pas encore rentré du club.

Elle haussa les épaules ; puis, après avoir dénoué ses cheveux qui tombèrent sur son cou en formant une magnifique cascade, elle reprit :

— Faites entrer le coiffeur.

— Madame, il n’est pas encore arrivé.

— Comment ? pas arrivé ! Le sot ! Le…

On sonna à la porte d’entrée.

— Ah ! c’est lui, sans doute.

Rosalie rentra.

— Eh bien ! est-ce enfin ce maudit coiffeur ?

— Non, Madame, c’est-à-dire si, Madame… C’est bien lui, ou plutôt ce n’est pas lui. M. Leblond fait dire à Madame qu’il ne pourra venir la coiffer ce soir, parce qu’il s’est foulé le poignet en tombant de son cabriolet. Mais il lui envoie à sa place son garçon.

— Un garçon pour me coiffer ! Mais c’est une indignité, une trahison. Ce bal sera, dit-on, magnifique, et je n’ai jamais eu plus d’envie d’être jolie… Neuf heures et demie passées !

Dans sa fureur, elle prit un mouchoir brodé qu’elle déchira à belles dents, et en jeta les lambeaux dans la cheminée ; cette action, fort simple en elle-même, apaisa un peu ses nerfs. Elle déboucha deux ou trois flacons, respira les bouchons, et se tournant vers la femme de chambre :

— Faites entrer ce garçon.

Quand il fut introduit :