Page:Grandville - Cent Proverbes, 1845.djvu/314

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
240
BON FAIT VOLER BAS

Trois semaines après, il le répétait de plus belle et avec plus de raison.

Pendant ces trois semaines, en effet, le sort des armes avait changé. Aidés par deux compagnies de mille hommes que les Parisiens leur avaient envoyées, et d’intelligence avec une notable minorité des bourgeois de Meaux, les Jacques avaient pourtant échoué devant cette forteresse. Une seule défaite suffit pour dissiper avec leurs folles espérances le prestige de leurs victoires passées. De tous côtés les compagnies d’aventure, les bandes anglaises, les milices bourgeoises, traquèrent comme des bêtes féroces les armées de Jacques Bonhomme. Les plaines de la Champagne et de la Picardie furent rougies de leur sang, et s’engraissèrent de leurs cadavres. Le comte de Foix (Gaston Phœbus), le roi de Navarre et le captal de Buch les enveloppaient de tous côtés, et faisaient grande boucherie de ces croquants.

Enfin, — le soir dont nous parlions, — Guillaume Caillet, tombé dans les griffes de Charles-le-Mauvais, expiait le meurtre du sire de Pecquigny, grand ami de ce prince. On l’avait jugé fort sommairement, — condamné, cela va sans dire ; — et, coiffé d’un trépied brûlant, il dansait au bout des branches d’un chêne le seul branle durant lequel les pieds ne touchent jamais à terre. En bon français, on l’avait pendu haut et court.

Geoffroy Thibie, — dont nous avons rapporté plus haut la réflexion philosophique, — avait repris à temps l’extérieur d’un paysan soumis aux seigneurs ; — personne n’avait ouï parler de lui, — et il mourut obscurément de sa belle mort, quelque cinquante ans après ses glorieuses équipées.