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BON FAIT VOLER BAS

Ce qui s’en suivit quand les vilains du Beauvoisis déclarèrent la guerre aux nobles, nous l’avons dit en commençant.

Seigneur de paille bat vassal d’acier, c’est le dicton de nos ajusteurs de procès ; et, dans cette occurrence, les seigneurs d’acier hachèrent menu les vassaux de paille ; mais non tout d’abord, néanmoins. Pendant quelques mois, les Jacques, — on les nommait ainsi, — prirent gaillardement leurs ébats aux dépens des hauts et puissants gentilshommes. Équipés de bons bâtons de pommier, fourches, vouges, leviers et tortouers, et d’aventure de quelque méchante pertuisane, ou de quelque forte arbalète de passe, Dieu sait comme s’en donnèrent ces mangeurs de fèves. En fait, ils se sentaient les prévôts aux trousses, et, au désespoir de leur salut, se démenaient comme les onze mille diables à la journée des sabots.

Brûler les grands bois, démolir les chàtellenies, occire et rôtir les chevaliers, efforcer les dames et damoiselles, c’était pain bénit pour ces honnêtes villageois, — à la vérité bien mal menés depuis les batailles de Poitiers et de Crécy. Parmi eux, — laissons encore parler messire Froissart, — « qui plus feroit de maux et de vilains faits, tels que créature humaine ne devroit et n’oseroit penser, celui étoit le plus prisé d’entre eux et le plus grand maître. »

Or, qui eût-ce été sinon Caillet ? Non point qu’au fond il eût plus de malice ou de vilenie en son escarcelle ; mais afin de se montrer le plus vaillant et le plus enragé. De même qu’il eût fait de son mieux pour courir après le loup, chanter : Allégez-moi, plaisant brunette, ou danser un branle sur les pelouses ; de même, — et plus en paroles