accuse pas d’avoir inventé une mille et deuxième nuit. Nous verrons bientôt quel fut le moyen de guérison que Scheherazade fit adopter grâces à son apologue.
Pendant que le conseil délibérait, Schahriar se disait, en lançant au ciel l’odorante fumée de son narghilé : J’ai promis à la sultane de respecter sa vie ; mais je n’ai fait aucune promesse de ce genre au visir, ni aux ministres, ni aux grands de la cour ; si je leur faisais trancher la tête pour me distraire ? Comme il ruminait en lui-même cette pensée, les ministres et les grands de la cour demandèrent à être admis auprès de Sa Hautesse. Schahriar les fit introduire. Le visir se prosterna la face contre terre, baisa six fois les babouches de son maître :
— Fils du Prophète, s’écria-t-il, cœur de lion, trône de splendeur, mer de magnificence…
— Assez ! assez ! interrompit Schahriar, que me voulez-vous ?
— Nous voulons, sublime sultan, chasser les nuages qui volent autour de ton front, ramener le sourire sur tes lèvres, et rendre la sérénité à ton auguste face. Nous avons découvert un moyen de te distraire.
— J’en ai trouvé un aussi ; si le vôtre n’est pas meilleur, je l’emploierai : je suis décidé à vous faire trancher la tête.
Un long frémissement parcourut l’assemblée. Le visir poursuivit son discours d’une voix entrecoupée. En supprimant les citations, les métaphores, les épithètes oiseuses, ce discours, qu’on a conservé dans les archives de la cour de Perse, remplirait encore cinq livraisons de cet ouvrage. Nous priverons nos lecteurs de ce morceau d’éloquence ; nous leur dirons seulement que Schahriar adopta le moyen